Maerten Jacobsz. van HEEMSKERCK et atelier Heemskerk, 1498 - Haarlem, 1574
Le Christ aux outrages
Sold 104,000
€ [$]
Maerten Jacobsz. van HEEMSKERCK et atelier Heemskerk, 1498 - Haarlem, 1574
Le Christ aux outrages
Huile sur panneau
Sans cadre
The mocking of Christ, oil on panel, by M. J. van Heemskerck and workshop
h: 79,50 w: 64 cm
Provenance : Collection Swen Böstrom, Stockholm, en 1950 ;
Vente anonyme ; Londres, Christie's, 23 février 1968, n° 26 ;
Vente anonyme ; Paris, Hôtel Drouot, Mes Rieunier, Bailly-Pommery, 19 mars 2001, n° 33 ;
Acquis lors de cette vente par l'actuel propriétaire ;
Collection particulière, Paris
Expositions : Gallery Lasson, Londres, 9 octobre - 10 décembre 1966
Bibliographie : 'Weltkunst', 15 octobre 1966, n°20, repr. de couverture
Théodore Crombie, "London Galleries. First fruits of the Fall", in 'Apollo', octobre 1966, p. 330-331, fig. 3
Rainald Grosshans, 'Maerten van Heemskerck. Die Gemälde', Berlin, 1980, p. 180, n°60, fig. 90
Commentaire : Le Christ est assis, le dos courbé, les épaules renfermées. Ses yeux crient la douleur de la flagellation qu'il vient de subir autant qu'ils pleurent la déraison de l'Homme qui le rejette.
"Les soldats l'emmenèrent à l'intérieur du palais, c'est-à-dire dans le Prétoire. Alors ils rassemblent toute la garde, ils le revêtent de pourpre, et lui posent sur la tête une couronne d'épines qu'ils ont tressée. Puis ils se mirent à lui faire des salutations, en disant : " Salut, roi des Juifs ! " Ils lui frappaient la tête avec un roseau, crachaient sur lui, et s'agenouillaient pour lui rendre hommage" (Mc 15, 16-19).
Après l'épisode de la flagellation, le Christ, que Ponce Pilate introduit à la foule par son " Ecce homo ", sort du prétoire affublé des instruments dérisoires de sa royauté moquée : la couronne d'épines, la tunique pourpre ensanglantée et le sceptre de roseau. Notre tableau constitue une exceptionnelle représentation de cet épisode de la Passion par Maerten Jacobsz. van Heemskerck, ici réinventée par l'artiste qui s'offre des libertés dans l'iconographie attestant aussi bien de son immense notoriété que de la désinvolture de son pinceau.
Maerten van Heemskerck se forme dans l'atelier de Jan van Scorel à Haarlem et son art portera à ses débuts la marque de son influence. Cette esthétique, que l'on peut désigner comme la première manière de van Heemskerck, sera le fruit d'un goût italianisant plutôt hésitant introduit dans cette région de l'Europe par Jan Gossaert notamment. Notre tableau s'inscrit dans la seconde période de production de notre artiste, beaucoup plus importante et surtout beaucoup plus sûre et virtuose. En effet, en 1532, notre artiste se rend en Italie. Ce voyage sera décisif dans la définition de son esthétique propre. Van Heemskerck s'installe à Rome et devient le spectateur privilégié de la révolution picturale qui est alors en cours dans la ville éternelle au lendemain du terrible sac de 1527 par les armées de Charles Quint. Tout était à reconstruire et le maniérisme se développe de façon vertigineuse, se détachant des idéaux humanistes de la première Renaissance. Il faut rompre avec l'exactitude des proportions, avec l'harmonie des couleurs, avec la réalité physique de l'espace. L'accent doit être mis sur la dimension émotionnelle de l'œuvre. Van Heemskerck fut profondément bouleversé par cette radicalité nouvelle. Il se prit au jeu du maniérisme pour ne jamais en revenir. Il collabora à Rome sur des chantiers prestigieux aux côtés de quelques grands acteurs de cette révolution. À son retour à Haarlem, son style a changé et l'artiste propose une manière résolument moderne et personnelle, résultat de l'association subtile de sa formation nordique et du maniérisme italien.
Notre panneau constitue le témoignage brillant de cette nouvelle manière et des immenses libertés plastiques prises par le peintre. Van Heemskerck nous livre un 'Christ aux outrages' - sujet plusieurs fois traité par l'artiste - qui reprend les principales composantes de l'iconographie habituelle, tout en y ajoutant des éléments nouveaux. Le Messie se détache sur un fond allant du rouge sang au brun profond, l'arrachant à tout contexte terrestre. Il tient dans sa main un verre de vin, rappelant la Sainte Cène et préfigurant déjà le mystère de l'Eucharistie. Dans son dos, deux figures d'anges tenant respectivement la croix et la colonne sont délicatement suggérées en transparence alors qu'un halo lumineux encercle son visage. La couronne d'épines semble comme vivante, trouvant racine dans le crâne du Christ, provoquant la naissance de jeunes pousses désorientées. Les désarticulations directement issues du maniérisme sont nombreuses. Elles sont manifestes aussi bien dans les torsions du cou et du corps de Jésus, que dans le drapé du manteau et la branche de roseau. L'assemblage de ces détails fait de ce tableau une œuvre d'une intensité rare et d'une modernité étourdissante. Elle évoque chez le spectateur, dans un grand écart historique et stylistique, aussi bien la subversion d'un Matthias Grünewald que la modernité futuriste d'un Salvador Dali ou d'une Tamara de Lempicka.
La copie d'un courrier du Dr. Rainald Grosshans en date du 20 juillet 2001 confirmant l'attribution sera remise à l'acquéreur.
Estimation 80 000 - 120 000 €
Sold 104,000 €
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