• CONSOLE D'ÉPOQUE RÉGENCE
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CONSOLE D'ÉPOQUE RÉGENCE
En bois sculpté et redoré, dessus de marbre rouge de Rance, la façade à décor de trophées inscrits dans un cartouche flanqué d'agrafes feuillagées et rinceaux fleuris sur un fond de croisillons, les montants en volute surmontés de palmettes et terminés par des sabots de capridé feuillagé réunis par une entretoise
H. : 82,5 cm (32 1/2 in.)
l. : 191,5 cm (75 1/3 in.)
P. : 81 cm (31 3/4 in.)

Provenance : Château de Montmort.

A Regence giltwood console

Réalisée vers la fin du règne de Louis XIV ou pendant les premières années de la Régence, cette table garde encore dans son aspect des réminiscences du style louis-quatorzien d'après 1700. La parfaite symétrie de l'agrafe médiane et des volutes qui s'étalent en-dessous de la ceinture, les fortes palmettes formant chutes à l'aplomb des pieds à enroulements, ainsi que la forme des traverses de l'entretoise sont autant d'éléments qui rappellent les compositions des tables et des consoles de l'époque Louis XIV.

L'agencement de notre table n'est pas sans rappeler celui d'une autre, dont le dessin avait été réalisé par Thomas Lainé (v.1682-1739) et qui fut gravé par Jean-Joseph Balechou (1718-1764), et publié au moins à deux reprises : une première fois anonymement et sans date (1) (fig. 1) et une seconde, où le nom de l'auteur des planches ainsi que la date 1740 sont mentionnés (2).

Si on considère d'un point de vue stylistique la table conçue par Lainé, on se rend facilement compte que le moment de l'élaboration de son dessin est antérieur aussi bien à la date 1740, inscrite sur les exemplaires de la Bibliothèque de l'Institut de l'Histoire de l'art de Paris et de Victoria and Albert Museum, ou à celle, plus ancienne de celui du Cabinet des Estampes de la Bibliothèque nationale de Paris, qu'on pourrait supposer dater des années 1730.

Ce Thomas Lainé, né à Paris vers 1682, était un architecte et décorateur employé des Bâtiments du Roi, qui travailla en 1708-1709 pour la chapelle royale du château de Versailles, aussi pour le château de Fontainebleau et pour la cathédrale Notre-Dame de Paris, avant de s'installer en 1714, à Avignon, où, entre autres, il dessina les motifs des boiseries de l'hôtel de Rochegude (3). Conservées depuis 1891 par le musée des Arts décoratifs de Paris, les boiseries du cabinet doré de cet hôtel avaient été commandées par Pierre-Joseph-Jacques de Robert (1700-1744), seigneur de Rochegude pour une maison qu'il avait achetée vers 1730 et qu'il fit reconstruire en 1732-1733. Comme le remarquait Adrian Marcel, "Ces très belles boiseries se voyaient dans le salon de réception ; elles ont des analogies avec la décoration de l'hôtel de Simiane (4) ; mais chose curieuse, elles paraissent […] un peu plus anciennes de style ; elles étaient cependant postérieures" (5).

On est en présence d'un phénomène courant qui est celui du rayonnement des modèles du centre, en l'occurrence Versailles/Paris, vers la province avignonnaise/aixoise ; aussi du décalage stylistique engendré par l'éloignement de l'artiste de ce même centre, qui propageait les modèles tels qu'il les avait pratiqués avant qu'il ne quitte la capitale et qui ne suivait plus l'évolution stylistique du centre.

Malgré la proximité avec le modèle de Thomas Lainé, on ne peut pas considérer notre table comme le travail d'un menuisier provincial. Toujours est-il que le prototype de notre table ainsi que son exécution d'une grande qualité doivent être mis en rapport avec la production des artistes décorateurs du bois qui travaillaient pour la Couronne. En effet, les sculpteurs Jules Degoullons (v.1671-1738), André Legoupil (1660/5-1733), Martin Bellan (†1714) et Pierre Taupin (v.1692-1739) fondèrent, le 21 janvier 1699, la Société pour les Bâtiments du Roi dont le premier but était de travailler pour le souverain, les princes et les princesses de sang, et les principaux membres de la famille royale, mais qui exécutèrent avec le temps, également des ouvrages pour la noblesse, les grands seigneurs et les financiers. Degoullons et Legoupil travaillèrent ainsi pour l'hôtel Peirenc de Moras, rue de Varenne dans les années 1730, dont un médaillon au-dessus d'un trumeau de glace est orné d'un trophée à carquois et brandons, lequel, bien qu'un peu plus tardif, ne manque pas de rappeler celui de notre table (fig. 2-3).

Enfin, nous connaissons une autre table-console de dimensions plus petites (160 cm de longueur) mais d'un modèle quasi-similaire à la nôtre, qui faisait autrefois partie des collections de Jean Bloch (6) (fig. 4). A l'évidence, les deux avaient été travaillées par le même sculpteur en bois et très certainement pour le même commanditaire et pour la même demeure.

Hélas, comme à l'accoutumé pour les meubles en bois doré, sauf une indication précise de provenance, telle celle des consoles pour le Palais Royal par exemple, connues grâce à des dessins contemporains à leur fabrication, il est presque impossible de les retrouver dans les inventaires de l'Ancien Régime. Cependant, la riche composition ainsi que la grande qualité de la sculpture de ces deux tables indiquent que leur auteur était un artisan avec un talent consommé, très probablement de l'entourage de la Société pour les Bâtiments du Roi.


1. Comme l'atteste l'exemplaire conservé au Cabinet des Estampes de la BnF, Ef 5 rés f°, dont le titre est Livre de divers desseins d'ornements. Utile aux personnes qui commencent à s'appliquer au dessein, et à ceux que leur proffession oblige d'en faire usage. Gravé par J. J. Balechou, et qui avait été publié et se vendait à Paris, chez la veuvre de F. Chereau, rue St-Jacques, aux Pilliers d'Or
2. Voir l'exemplaire conservé Bibliothèque de l'INHA, NUM FOL RES 56, dont le titre est Livre de divers desseins d'ornements. Utile aux personnes qui commencent à s'appliquer au dessein, qu'à ceux que leur proffession obligent journellement d'en faire usage. Inventé par Mr Lainé architecte et sculpteur du Roy, mis à jour par les soins du Sr R[e]né Viale peintre du Roy. Gravé à Paris par J. J. Balechou, 1740 avec privilège du Roy et qui se vendait à Aix en Provence chez Monsieur Viale peintre. Un autre exemplaire conservé à Londres, Victoria and Albert Musem, inv. E.313-1952.
3. Joseph Girard, Evocation du Vieil Avignon, Paris, Les Editions du Minuit, 2000, p. 330. Adrien Marcel, " Un artiste parisien à Avignon, Thomas Lainée (1682-1739) ", Mémoires de l'Académie de Vaucluse, 1923, 2e série, t. XXIII, p. 29-30.
4. L'hôtel avait été vendu par Pauline de Castellane, veuve du marquis de Simiane, en 1730. Par conséquent, les travaux de décoration de Lainé dans la demeure aixoise de la petite fille de Madame de Sévigné étaient antérieurs à cette date et dataient du temps ou l'hôtel appartenait à sa mère, Madame de Grignan.
5. Adrien Marcel, op. cit., p. 30.
6. Vente coll. Jean Bloch, Paris, palais Galliera, Mes Ader-Rheims, le 13 juin 1961, n°133, puis vente, Paris, Me Kohn, le 15 février 2022, n°47.


Estimation 60 000 - 80 000 €

Sold 98,400 €
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Lot 20

CONSOLE D'ÉPOQUE RÉGENCE

Sold 98,400 € [$]

CONSOLE D'ÉPOQUE RÉGENCE
En bois sculpté et redoré, dessus de marbre rouge de Rance, la façade à décor de trophées inscrits dans un cartouche flanqué d'agrafes feuillagées et rinceaux fleuris sur un fond de croisillons, les montants en volute surmontés de palmettes et terminés par des sabots de capridé feuillagé réunis par une entretoise
H. : 82,5 cm (32 1/2 in.)
l. : 191,5 cm (75 1/3 in.)
P. : 81 cm (31 3/4 in.)

Provenance : Château de Montmort.

A Regence giltwood console

Réalisée vers la fin du règne de Louis XIV ou pendant les premières années de la Régence, cette table garde encore dans son aspect des réminiscences du style louis-quatorzien d'après 1700. La parfaite symétrie de l'agrafe médiane et des volutes qui s'étalent en-dessous de la ceinture, les fortes palmettes formant chutes à l'aplomb des pieds à enroulements, ainsi que la forme des traverses de l'entretoise sont autant d'éléments qui rappellent les compositions des tables et des consoles de l'époque Louis XIV.

L'agencement de notre table n'est pas sans rappeler celui d'une autre, dont le dessin avait été réalisé par Thomas Lainé (v.1682-1739) et qui fut gravé par Jean-Joseph Balechou (1718-1764), et publié au moins à deux reprises : une première fois anonymement et sans date (1) (fig. 1) et une seconde, où le nom de l'auteur des planches ainsi que la date 1740 sont mentionnés (2).

Si on considère d'un point de vue stylistique la table conçue par Lainé, on se rend facilement compte que le moment de l'élaboration de son dessin est antérieur aussi bien à la date 1740, inscrite sur les exemplaires de la Bibliothèque de l'Institut de l'Histoire de l'art de Paris et de Victoria and Albert Museum, ou à celle, plus ancienne de celui du Cabinet des Estampes de la Bibliothèque nationale de Paris, qu'on pourrait supposer dater des années 1730.

Ce Thomas Lainé, né à Paris vers 1682, était un architecte et décorateur employé des Bâtiments du Roi, qui travailla en 1708-1709 pour la chapelle royale du château de Versailles, aussi pour le château de Fontainebleau et pour la cathédrale Notre-Dame de Paris, avant de s'installer en 1714, à Avignon, où, entre autres, il dessina les motifs des boiseries de l'hôtel de Rochegude (3). Conservées depuis 1891 par le musée des Arts décoratifs de Paris, les boiseries du cabinet doré de cet hôtel avaient été commandées par Pierre-Joseph-Jacques de Robert (1700-1744), seigneur de Rochegude pour une maison qu'il avait achetée vers 1730 et qu'il fit reconstruire en 1732-1733. Comme le remarquait Adrian Marcel, "Ces très belles boiseries se voyaient dans le salon de réception ; elles ont des analogies avec la décoration de l'hôtel de Simiane (4) ; mais chose curieuse, elles paraissent […] un peu plus anciennes de style ; elles étaient cependant postérieures" (5).

On est en présence d'un phénomène courant qui est celui du rayonnement des modèles du centre, en l'occurrence Versailles/Paris, vers la province avignonnaise/aixoise ; aussi du décalage stylistique engendré par l'éloignement de l'artiste de ce même centre, qui propageait les modèles tels qu'il les avait pratiqués avant qu'il ne quitte la capitale et qui ne suivait plus l'évolution stylistique du centre.

Malgré la proximité avec le modèle de Thomas Lainé, on ne peut pas considérer notre table comme le travail d'un menuisier provincial. Toujours est-il que le prototype de notre table ainsi que son exécution d'une grande qualité doivent être mis en rapport avec la production des artistes décorateurs du bois qui travaillaient pour la Couronne. En effet, les sculpteurs Jules Degoullons (v.1671-1738), André Legoupil (1660/5-1733), Martin Bellan (†1714) et Pierre Taupin (v.1692-1739) fondèrent, le 21 janvier 1699, la Société pour les Bâtiments du Roi dont le premier but était de travailler pour le souverain, les princes et les princesses de sang, et les principaux membres de la famille royale, mais qui exécutèrent avec le temps, également des ouvrages pour la noblesse, les grands seigneurs et les financiers. Degoullons et Legoupil travaillèrent ainsi pour l'hôtel Peirenc de Moras, rue de Varenne dans les années 1730, dont un médaillon au-dessus d'un trumeau de glace est orné d'un trophée à carquois et brandons, lequel, bien qu'un peu plus tardif, ne manque pas de rappeler celui de notre table (fig. 2-3).

Enfin, nous connaissons une autre table-console de dimensions plus petites (160 cm de longueur) mais d'un modèle quasi-similaire à la nôtre, qui faisait autrefois partie des collections de Jean Bloch (6) (fig. 4). A l'évidence, les deux avaient été travaillées par le même sculpteur en bois et très certainement pour le même commanditaire et pour la même demeure.

Hélas, comme à l'accoutumé pour les meubles en bois doré, sauf une indication précise de provenance, telle celle des consoles pour le Palais Royal par exemple, connues grâce à des dessins contemporains à leur fabrication, il est presque impossible de les retrouver dans les inventaires de l'Ancien Régime. Cependant, la riche composition ainsi que la grande qualité de la sculpture de ces deux tables indiquent que leur auteur était un artisan avec un talent consommé, très probablement de l'entourage de la Société pour les Bâtiments du Roi.


1. Comme l'atteste l'exemplaire conservé au Cabinet des Estampes de la BnF, Ef 5 rés f°, dont le titre est Livre de divers desseins d'ornements. Utile aux personnes qui commencent à s'appliquer au dessein, et à ceux que leur proffession oblige d'en faire usage. Gravé par J. J. Balechou, et qui avait été publié et se vendait à Paris, chez la veuvre de F. Chereau, rue St-Jacques, aux Pilliers d'Or
2. Voir l'exemplaire conservé Bibliothèque de l'INHA, NUM FOL RES 56, dont le titre est Livre de divers desseins d'ornements. Utile aux personnes qui commencent à s'appliquer au dessein, qu'à ceux que leur proffession obligent journellement d'en faire usage. Inventé par Mr Lainé architecte et sculpteur du Roy, mis à jour par les soins du Sr R[e]né Viale peintre du Roy. Gravé à Paris par J. J. Balechou, 1740 avec privilège du Roy et qui se vendait à Aix en Provence chez Monsieur Viale peintre. Un autre exemplaire conservé à Londres, Victoria and Albert Musem, inv. E.313-1952.
3. Joseph Girard, Evocation du Vieil Avignon, Paris, Les Editions du Minuit, 2000, p. 330. Adrien Marcel, " Un artiste parisien à Avignon, Thomas Lainée (1682-1739) ", Mémoires de l'Académie de Vaucluse, 1923, 2e série, t. XXIII, p. 29-30.
4. L'hôtel avait été vendu par Pauline de Castellane, veuve du marquis de Simiane, en 1730. Par conséquent, les travaux de décoration de Lainé dans la demeure aixoise de la petite fille de Madame de Sévigné étaient antérieurs à cette date et dataient du temps ou l'hôtel appartenait à sa mère, Madame de Grignan.
5. Adrien Marcel, op. cit., p. 30.
6. Vente coll. Jean Bloch, Paris, palais Galliera, Mes Ader-Rheims, le 13 juin 1961, n°133, puis vente, Paris, Me Kohn, le 15 février 2022, n°47.


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Sold 98,400 €
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Sale: 4351
Date: 13 Dec. 2023 18:00
Auctioneer: Matthieu Fournier

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