Sale Old Master & 19th Century Art - 22 november 2023 /Lot 76 Jean-Jacques-François LE BARBIER Rouen, 1738 - Paris, 1826 Le triomphe de Flore

  • Jean-Jacques-François LE BARBIER Rouen, 1738 - Paris, 1826 Le triomphe de Flore Huile sur toile
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Jean-Jacques-François LE BARBIER Rouen, 1738 - Paris, 1826
Le triomphe de Flore
Huile sur toile
Signée 'Lebarbier' en bas à droite

The triumph of Flora, oil on canvas, signed, by J.-J.-F. Le Barbier
h: 128,50 w: 190 cm

Provenance : Collection Nicolas Beaujon, conseiller d'Etat, trésorier ordinaire de l'ordre royal et militaire de Saint-Louis, receveur général des finances de la généralité de Rouen, listée dans l'inventaire de M. Beaujon dressé le 29 janvier 1787, n° 105 "Le triomphe de la Déesse flore par le Barbier l'ainé dans sa bordure dorée prisé trois cent livres" ;
Sa vente, Paris, hôtel d'Evreux, 25 avril 1787, n° 112 ;
Acquis par les parents de l'actuelle propriétaire à la galerie Boussery à Knokke en 1971 ;
Collection particulière, Belgique


Bibliographie : 'Discours sur l'origine, les progrès et l'état actuel de la peinture en France, Contenant des notices sur les principaux artistes de l'Académie, pour servir d'introduction au Sallon', Paris, 1785, p. 21
Luc-Vincent Thiery de Sainte-Colombe, 'Guide des amateurs et des étrangers voyageurs à Paris ou Description raisonné de cette ville, de sa banlieue, & de tout ce qu'elles contiennent de remarquable', Paris, 1787, t. I, 84
Guillaume Faroult, "Pierre-Louis Eveillard de Livois, portrait d'un collectionneur angevin à la fin de l'Ancien Régime", in 'Bulletin de la Société de l'Histoire de l'Art Français', année 1999, 2000, p. 147, p. 155, note 95, p. 165, note 5
Michel Jacq-Hergoualc'h, 'Jean-Jacques François Le Barbier l'aîné 1738-1826. La vie et l'art. Catalogue de l'oeuvre peint', Columbia, 2019, tome I, p. 162, n° P 26

Commentaire : Au début des années 1770, Jean-Jacques-François Le Barbier dit " Le Barbier l'Aîné " s'adonne à la réalisation de scènes plaisantes et élégantes d'inspiration antique, qui s'inscrivent dans le sillage de la série de quatre tableaux commandée en 1773 à Joseph-Marie Vien par la comtesse du Barry pour la décoration du pavillon de Louveciennes. Après une première formation à l'école des beaux-arts de Rouen, Le Barbier s'installe à Paris en 1758. Très vite, il intègre l'atelier du peintre à succès Jean-Baptiste Marie Pierre ce qui lui permet d'être au plus près des développements artistiques de l'époque et facilite sans doute son introduction auprès de la clientèle parisienne. Notre tableau, représentant le triomphe de Flore assise sur son char, s'insère donc dans cette production des années 1770 où la grâce, la simplicité et les couleurs pures sont autant de qualités recherchées en peinture. Notre tableau figure de nombreux personnages en liesse célébrant la déesse : qu'ils soient de part et d'autre de celle-ci, portant un brûle parfum, tirant le char ou tenant une couronne de fleurs. Le vocabulaire antique est ainsi mis à l'honneur tant dans les costumes des personnages que dans les architectures qui accompagnent la scène. Sur la gauche du tableau est figurée une tholos tandis que la scène se déroule dans un espace en pierre clos rythmé par deux fontaines et deux sculptures à l'antique. Au centre du tableau, une ouverture offre une échappée sur un paysage vallonné.
Alors qu'il n'est qu'un jeune peintre d'une trentaine d'années, les œuvres de Le Barbier sont remarquées et achetées par certains grands amateurs de l'époque. Ainsi, Pierre-Louis Eveillard de Livois possède plusieurs tableaux de sa main. Sa collection compte par exemple La Grotte d'Egérie, aujourd'hui conservé au musée des Beaux-Arts de Rouen. Le Cortège de Flore est par ailleurs mentionné par Pierre-Louis Eveillard de Livois dans une lettre adressée à Jean-Jacques Lenoir en date du 14 mars 1777 alors qu'il évoque le peintre : "C'est une fête en l'honneur de Flore, figures de 8 à 9 pouces de proportion, tout y est semé de fleurs et elles n'ont produit que des épines, transplantés au Louvre. Quoiqu'il en soit mr Barbier est un artiste à chérir et je compte bien le cultiver. J'ai vu de ses desseins, et j'ai même eu la velléité de lui achepter le dessein de son fameux tableau, mais le prix m'a fait peur, d'autant mieux qu'avec deux louis de plus j'aurai un joli tableau de lui que je préfère à ses desseins qui sont bien loin de l'esprit et du charme que l'on trouve dans ceux de mr R..."1. Trois dessins en rapport avec notre tableau sont aujourd'hui connus. L'un, signé et daté de 1767, est passé en vente à deux reprises le 30 mai 1924 et le 22 décembre 1943 2 (fig.1). Un second est apparu sur le marché lors d'une vente à l'hôtel Drouot le 20 décembre 1983. Enfin en 2015, un ricordo de la scène est vendu à nouveau à l'hôtel Drouot4. Tous nous offrent un témoignage de la longue gestation de l'œuvre et du processus de création de l'artiste.
Si Pierre-Louis Eveillard de Livois connaît de toute évidence notre tableau, le riche financier Nicolas Beaujon en est l'acquéreur. Installé à l'hôtel d'Evreux à partir de 1774, il y fait aménager une galerie par Etienne-Louis Boullée (1728-1799) dans laquelle il expose une partie de sa collection de tableaux. Aux murs de cette galerie étaient présentées des œuvres de différents grands maîtres français, italiens flamands et hollandais comme Jean-Baptiste Santerre, Pierre-Paul Rubens, Frans van Mieris, Charles Le Brun, ou Nicolas Poussin. D'autres tableaux étaient présentés dans les petits appartements de l'hôtel d'Evreux. Ainsi dans son 'Guide des amateurs et des étrangers voyageurs à Paris ou Description raisonnée de cette ville, de sa banlieue, & de tout ce qu'elles contiennent de remarquable', Luc-Vincent Thiéry indique qu'à côté du salon dans lequel il est possible d'admirer un Saint Roch du Guide, un Sénèque du Guerchin et Antiope de Rubens, se trouve un cabinet contenant : " quelques tableaux de Pater, Lancret, Vanlo, MM. Wille, Houel, Doyen, & plusieurs têtes d'étude ; deux fêtes grecques par M. le Barbier l'aîné ; des portraits par Santerre & Grimoux (…) "5. L'inventaire après décès de Nicolas Beaujon, dressé le 29 janvier 1787, nous donne une description plus précise des œuvres qui nous permet d'identifier formellement notre tableau : " un triomphe de la déesse Flore est prisé pour 300 livres "6. Dans le catalogue de vente du financier du 25 avril 1787, l'œuvre est également décrite au numéro 112 : " Le triomphe de la déesse Flore, elle est assise dans un char, environnée de femmes et d'autres personnages. Cette fête se célèbre dans un jardin agréable & orné d'architecture, on y compte quarante figures ; il est peint sur toile & porte 3 pieds 8 pouces de haut, sur 5 pieds 9 pouces de large "7.
Grâce au Discours sur l'origine, les progrès et l'état actuel de la peinture en France, contenant des notices sur les principaux artistes de l'Académie et qui servait d'introduction au salon de 1785, nous apprenons que chez Nicolas Beaujon l'œuvre était présentée en pendant d'Une fête de Diane' (1777, passée en vente chez Tajan le 14 décembre 1998 (fig.2)) : " les connoisseurs admirent également son Siège de Beauvais, & deux tableaux faisant partie de la galerie de M. de Beaujon, l'un représentant la fête de Flore, l'autre une fête de Diane "8. De toute évidence, Le Barbier avait su, par ses œuvres, attirer l'attention des grands amateurs des années 1770.
Evoquant le tableau aujourd'hui conservé au musée des Beaux-Arts de Rouen, Pierre-Louis Eveillard de Livois aborde la réception de notre Triomphe de Flore: "Sur le devant et, selon moi, trop près du bord, sont des baigneuses, dont la disposition me plaist assez, et je ne doute point qu'elles ne soient d'un faire aimable, et d'une couleur ragoutante mais je crains le pédant et cette froide imitation de l'antique dont je n'ai vu que trop de preuves dans son grand tableau qui devoit être, selon lui, l'oracle d'une destinée plus heureuse"9. Comme le suggère Guillaume Faroult dans son article de 1999, il est probable que Jean-Jacques Le Barbier ait destiné notre tableau de très grand format à l'Académie Royale de peinture et de sculpture, peut-être en vue de son agrément10. Nous savons que l'artiste n'est finalement agréé qu'en 1781 puis reçu en 1785 avec 'Jupiter endormi sur le mont Ida' (musée du Louvre) ce qui suggère l'accueil possiblement mitigé de notre tableau à l'Académie. Notre tableau est toutefois un des plus anciens témoignages peints de l'œuvre de Le Barbier. Exceptionnel par sa provenance, il est la preuve de son ambition et de sa bonne appréhension du marché parisien des années 1770.

1. Lettre de Livois à Jean-Jacques Lenoir du 17 mars 1777, MS 1352 (119), pièce 38, Bibliothèque municipale d'Angers, publiée par Guillaume Faroult, " Pierre-Louis Eveillard de Livois, portrait d'un collectionneur angevin à la fin de l'Ancien Régime ", Bulletin de la Société de l'Histoire de l'Art Français, année 1999, 2000, p. 156.
2. Jean-Jacques François Le Barbier l'aîné, Le cortège de Flore, signé 'Le Barbier lainé' et daté '1767', aquarelle, 41 x 60 cm, Paris, Galerie Georges Petit, Me Lair Dubreuil, 30 mai 1924, n° 86 (adjugé 4 000 francs) et Paris, hôtel Drouot, Me Baudoin, 22 décembre 1943, n° 65.
3. Jean-Jacques François Le Barbier l'aîné, Le cortège de Flore, plume et encre brune, aquarelle, 41 x 55,5 cm, Paris, hôtel Drouot, Couturier-Nicolay, 20 décembre 1988, n° 13 (adjugé 79 000 francs).
4. Jean-Jacques Le Barbier, Le triomphe du Printemps, plume et aquarelle, signée en bas à gauche, 19,8 x 56 cm, Paris, hôtel Drouot, 6 mars 2015, n° 7.
5. Luc-Vincent Thiery de Sainte-Colombe, Guide des amateurs et des étrangers voyageurs à Paris, ou Description raisonnée de cette ville, de sa banlieue et de tout ce qu'elles contiennent de remarquable, Paris, Éditions Hardouin et Gattey, 1787, p. 84.
6. Paris, Archives Nationales, MC, LV, 76.
7. Catalogue des tableaux, marbres, bronzes, porcelaines, lustres… après le décès de M. Beaujon, conseiller d'Etat, trésorier honoraire de l'ordre royal & militaire de Saint-Louis, receveur général des finances de la généralité de Rouen, par R. Remy et C. F. Julliot, Paris, 1787, p. 46
8. Jean-Jacques François Le Barbier l'aîné, L'hommage à la déesse Diane, toile, signée et datée 'Le Barbier pinxit / 1777' en bas à droite, 130 x 188,5 cm, Paris, Espace Tajan-Turquin, 14 décembre 1998, n° 251 (adjugé 700 000 francs)
9. Faroult, op. cit., p. 156.
10. Ibid., p. 155.

Estimation 100 000 - 150 000 €

Sold 196,800 €
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Lot 76

Jean-Jacques-François LE BARBIER Rouen, 1738 - Paris, 1826
Le triomphe de Flore

Sold 196,800 € [$]

Jean-Jacques-François LE BARBIER Rouen, 1738 - Paris, 1826
Le triomphe de Flore
Huile sur toile
Signée 'Lebarbier' en bas à droite

The triumph of Flora, oil on canvas, signed, by J.-J.-F. Le Barbier
h: 128,50 w: 190 cm

Provenance : Collection Nicolas Beaujon, conseiller d'Etat, trésorier ordinaire de l'ordre royal et militaire de Saint-Louis, receveur général des finances de la généralité de Rouen, listée dans l'inventaire de M. Beaujon dressé le 29 janvier 1787, n° 105 "Le triomphe de la Déesse flore par le Barbier l'ainé dans sa bordure dorée prisé trois cent livres" ;
Sa vente, Paris, hôtel d'Evreux, 25 avril 1787, n° 112 ;
Acquis par les parents de l'actuelle propriétaire à la galerie Boussery à Knokke en 1971 ;
Collection particulière, Belgique


Bibliographie : 'Discours sur l'origine, les progrès et l'état actuel de la peinture en France, Contenant des notices sur les principaux artistes de l'Académie, pour servir d'introduction au Sallon', Paris, 1785, p. 21
Luc-Vincent Thiery de Sainte-Colombe, 'Guide des amateurs et des étrangers voyageurs à Paris ou Description raisonné de cette ville, de sa banlieue, & de tout ce qu'elles contiennent de remarquable', Paris, 1787, t. I, 84
Guillaume Faroult, "Pierre-Louis Eveillard de Livois, portrait d'un collectionneur angevin à la fin de l'Ancien Régime", in 'Bulletin de la Société de l'Histoire de l'Art Français', année 1999, 2000, p. 147, p. 155, note 95, p. 165, note 5
Michel Jacq-Hergoualc'h, 'Jean-Jacques François Le Barbier l'aîné 1738-1826. La vie et l'art. Catalogue de l'oeuvre peint', Columbia, 2019, tome I, p. 162, n° P 26

Commentaire : Au début des années 1770, Jean-Jacques-François Le Barbier dit " Le Barbier l'Aîné " s'adonne à la réalisation de scènes plaisantes et élégantes d'inspiration antique, qui s'inscrivent dans le sillage de la série de quatre tableaux commandée en 1773 à Joseph-Marie Vien par la comtesse du Barry pour la décoration du pavillon de Louveciennes. Après une première formation à l'école des beaux-arts de Rouen, Le Barbier s'installe à Paris en 1758. Très vite, il intègre l'atelier du peintre à succès Jean-Baptiste Marie Pierre ce qui lui permet d'être au plus près des développements artistiques de l'époque et facilite sans doute son introduction auprès de la clientèle parisienne. Notre tableau, représentant le triomphe de Flore assise sur son char, s'insère donc dans cette production des années 1770 où la grâce, la simplicité et les couleurs pures sont autant de qualités recherchées en peinture. Notre tableau figure de nombreux personnages en liesse célébrant la déesse : qu'ils soient de part et d'autre de celle-ci, portant un brûle parfum, tirant le char ou tenant une couronne de fleurs. Le vocabulaire antique est ainsi mis à l'honneur tant dans les costumes des personnages que dans les architectures qui accompagnent la scène. Sur la gauche du tableau est figurée une tholos tandis que la scène se déroule dans un espace en pierre clos rythmé par deux fontaines et deux sculptures à l'antique. Au centre du tableau, une ouverture offre une échappée sur un paysage vallonné.
Alors qu'il n'est qu'un jeune peintre d'une trentaine d'années, les œuvres de Le Barbier sont remarquées et achetées par certains grands amateurs de l'époque. Ainsi, Pierre-Louis Eveillard de Livois possède plusieurs tableaux de sa main. Sa collection compte par exemple La Grotte d'Egérie, aujourd'hui conservé au musée des Beaux-Arts de Rouen. Le Cortège de Flore est par ailleurs mentionné par Pierre-Louis Eveillard de Livois dans une lettre adressée à Jean-Jacques Lenoir en date du 14 mars 1777 alors qu'il évoque le peintre : "C'est une fête en l'honneur de Flore, figures de 8 à 9 pouces de proportion, tout y est semé de fleurs et elles n'ont produit que des épines, transplantés au Louvre. Quoiqu'il en soit mr Barbier est un artiste à chérir et je compte bien le cultiver. J'ai vu de ses desseins, et j'ai même eu la velléité de lui achepter le dessein de son fameux tableau, mais le prix m'a fait peur, d'autant mieux qu'avec deux louis de plus j'aurai un joli tableau de lui que je préfère à ses desseins qui sont bien loin de l'esprit et du charme que l'on trouve dans ceux de mr R..."1. Trois dessins en rapport avec notre tableau sont aujourd'hui connus. L'un, signé et daté de 1767, est passé en vente à deux reprises le 30 mai 1924 et le 22 décembre 1943 2 (fig.1). Un second est apparu sur le marché lors d'une vente à l'hôtel Drouot le 20 décembre 1983. Enfin en 2015, un ricordo de la scène est vendu à nouveau à l'hôtel Drouot4. Tous nous offrent un témoignage de la longue gestation de l'œuvre et du processus de création de l'artiste.
Si Pierre-Louis Eveillard de Livois connaît de toute évidence notre tableau, le riche financier Nicolas Beaujon en est l'acquéreur. Installé à l'hôtel d'Evreux à partir de 1774, il y fait aménager une galerie par Etienne-Louis Boullée (1728-1799) dans laquelle il expose une partie de sa collection de tableaux. Aux murs de cette galerie étaient présentées des œuvres de différents grands maîtres français, italiens flamands et hollandais comme Jean-Baptiste Santerre, Pierre-Paul Rubens, Frans van Mieris, Charles Le Brun, ou Nicolas Poussin. D'autres tableaux étaient présentés dans les petits appartements de l'hôtel d'Evreux. Ainsi dans son 'Guide des amateurs et des étrangers voyageurs à Paris ou Description raisonnée de cette ville, de sa banlieue, & de tout ce qu'elles contiennent de remarquable', Luc-Vincent Thiéry indique qu'à côté du salon dans lequel il est possible d'admirer un Saint Roch du Guide, un Sénèque du Guerchin et Antiope de Rubens, se trouve un cabinet contenant : " quelques tableaux de Pater, Lancret, Vanlo, MM. Wille, Houel, Doyen, & plusieurs têtes d'étude ; deux fêtes grecques par M. le Barbier l'aîné ; des portraits par Santerre & Grimoux (…) "5. L'inventaire après décès de Nicolas Beaujon, dressé le 29 janvier 1787, nous donne une description plus précise des œuvres qui nous permet d'identifier formellement notre tableau : " un triomphe de la déesse Flore est prisé pour 300 livres "6. Dans le catalogue de vente du financier du 25 avril 1787, l'œuvre est également décrite au numéro 112 : " Le triomphe de la déesse Flore, elle est assise dans un char, environnée de femmes et d'autres personnages. Cette fête se célèbre dans un jardin agréable & orné d'architecture, on y compte quarante figures ; il est peint sur toile & porte 3 pieds 8 pouces de haut, sur 5 pieds 9 pouces de large "7.
Grâce au Discours sur l'origine, les progrès et l'état actuel de la peinture en France, contenant des notices sur les principaux artistes de l'Académie et qui servait d'introduction au salon de 1785, nous apprenons que chez Nicolas Beaujon l'œuvre était présentée en pendant d'Une fête de Diane' (1777, passée en vente chez Tajan le 14 décembre 1998 (fig.2)) : " les connoisseurs admirent également son Siège de Beauvais, & deux tableaux faisant partie de la galerie de M. de Beaujon, l'un représentant la fête de Flore, l'autre une fête de Diane "8. De toute évidence, Le Barbier avait su, par ses œuvres, attirer l'attention des grands amateurs des années 1770.
Evoquant le tableau aujourd'hui conservé au musée des Beaux-Arts de Rouen, Pierre-Louis Eveillard de Livois aborde la réception de notre Triomphe de Flore: "Sur le devant et, selon moi, trop près du bord, sont des baigneuses, dont la disposition me plaist assez, et je ne doute point qu'elles ne soient d'un faire aimable, et d'une couleur ragoutante mais je crains le pédant et cette froide imitation de l'antique dont je n'ai vu que trop de preuves dans son grand tableau qui devoit être, selon lui, l'oracle d'une destinée plus heureuse"9. Comme le suggère Guillaume Faroult dans son article de 1999, il est probable que Jean-Jacques Le Barbier ait destiné notre tableau de très grand format à l'Académie Royale de peinture et de sculpture, peut-être en vue de son agrément10. Nous savons que l'artiste n'est finalement agréé qu'en 1781 puis reçu en 1785 avec 'Jupiter endormi sur le mont Ida' (musée du Louvre) ce qui suggère l'accueil possiblement mitigé de notre tableau à l'Académie. Notre tableau est toutefois un des plus anciens témoignages peints de l'œuvre de Le Barbier. Exceptionnel par sa provenance, il est la preuve de son ambition et de sa bonne appréhension du marché parisien des années 1770.

1. Lettre de Livois à Jean-Jacques Lenoir du 17 mars 1777, MS 1352 (119), pièce 38, Bibliothèque municipale d'Angers, publiée par Guillaume Faroult, " Pierre-Louis Eveillard de Livois, portrait d'un collectionneur angevin à la fin de l'Ancien Régime ", Bulletin de la Société de l'Histoire de l'Art Français, année 1999, 2000, p. 156.
2. Jean-Jacques François Le Barbier l'aîné, Le cortège de Flore, signé 'Le Barbier lainé' et daté '1767', aquarelle, 41 x 60 cm, Paris, Galerie Georges Petit, Me Lair Dubreuil, 30 mai 1924, n° 86 (adjugé 4 000 francs) et Paris, hôtel Drouot, Me Baudoin, 22 décembre 1943, n° 65.
3. Jean-Jacques François Le Barbier l'aîné, Le cortège de Flore, plume et encre brune, aquarelle, 41 x 55,5 cm, Paris, hôtel Drouot, Couturier-Nicolay, 20 décembre 1988, n° 13 (adjugé 79 000 francs).
4. Jean-Jacques Le Barbier, Le triomphe du Printemps, plume et aquarelle, signée en bas à gauche, 19,8 x 56 cm, Paris, hôtel Drouot, 6 mars 2015, n° 7.
5. Luc-Vincent Thiery de Sainte-Colombe, Guide des amateurs et des étrangers voyageurs à Paris, ou Description raisonnée de cette ville, de sa banlieue et de tout ce qu'elles contiennent de remarquable, Paris, Éditions Hardouin et Gattey, 1787, p. 84.
6. Paris, Archives Nationales, MC, LV, 76.
7. Catalogue des tableaux, marbres, bronzes, porcelaines, lustres… après le décès de M. Beaujon, conseiller d'Etat, trésorier honoraire de l'ordre royal & militaire de Saint-Louis, receveur général des finances de la généralité de Rouen, par R. Remy et C. F. Julliot, Paris, 1787, p. 46
8. Jean-Jacques François Le Barbier l'aîné, L'hommage à la déesse Diane, toile, signée et datée 'Le Barbier pinxit / 1777' en bas à droite, 130 x 188,5 cm, Paris, Espace Tajan-Turquin, 14 décembre 1998, n° 251 (adjugé 700 000 francs)
9. Faroult, op. cit., p. 156.
10. Ibid., p. 155.

Estimation 100 000 - 150 000 €

Sold 196,800 €
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Sale: 4335
Date: 22 nov. 2023 16:00
Auctioneer: Matthieu Fournier

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